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« En Suisse, ce sont la qualité et le service qui priment »

Tech

22 juin 2021

Interview : Jérémie Bichet est le responsable commercial de PLSWISS, filiale du groupe français Cofiem Electronics. Les deux sociétés sont actives dans la réparation et la fourniture d’équipements électroniques industriels obsolètes – un concept plutôt méconnu en Suisse, du moins jusqu’à l’arrivée de PLSWISS au Marly Innovation Center de Fribourg en 2018.

 

Quels services proposez-vous à votre clientèle française, suisse et internationale ?

L’activité de Cofiem consiste à récupérer du matériel électronique chez nos clients, le stocker, le reconditionner à neuf ou dans un état proche du neuf et le revendre. Le but est de pallier à l’obsolescence des produits électroniques qui ne sont plus distribués : tous les 15 ou 20 ans, des séries s’arrêtent, alors que les machines et les installations peuvent être conçues pour 30, 40, voire 50 ans. Cofiem anticipe les changements technologiques et crée des stocks stratégiques, afin de dépanner ses clients. Nous nous occupons également du maintien en conditions opérationnelles, ou MCO : une gestion de stock externalisée et une assurance de disponibilité sur des équipements obsolètes. Concrètement, on analyse l’ensemble des équipements électroniques du client et on évalue la criticité de chaque produit, c’est-à-dire s’il sera facile ou difficile à trouver sur le marché. Sur la base des résultats de cette étude d’obsolescence, nous proposons différentes stratégies pour assurer la disponibilité des matériels et des systèmes. Nous intervenons également dans le démontage d’installations industrielles, où nous nous chargeons notamment de toutes les machines électroniques. En général, 40 à 60 % du matériel électronique qu’on récupère est réemployé ; environ 35 % est démonté, trié et recyclé ; et à la fin du processus, il ne reste qu’un petit pourcentage de déchets impossibles à recycler.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières lors du lancement de la filiale suisse il y a trois ans ?

Il y avait une grosse inconnue par rapport à la réaction du marché helvétique, car on était dans les premiers à proposer ce type de service. L’absence de concurrence a certainement un côté positif, mais cela signifie aussi que nous avons dû beaucoup travailler les deux premières années pour convaincre nos prospects du bien-fondé de notre concept. Nous avions déjà une quarantaine de clients en Suisse, principalement de grands donneurs d’ordre côté Suisse romand, qui nous ont soutenus et rassurés quant au potentiel du marché local. La perception de notre métier a beaucoup évolué entretemps, d’une part grâce à une sensibilité écologique accrue, mais aussi parce que nous avons pu démontrer l’efficacité à la fois économique et technique de continuer à faire fonctionner des machines existantes. Le bouche-à-oreille a fait le reste.

Pourquoi avez-vous décidé de vous installer dans le canton de Fribourg, et plus précisément au Marly Innovation Center ?

J’avais carte blanche sur le lieu d’installation de Cofiem en Suisse. Le GGBa a organisé des visites de différents cantons et parcs technologiques, ce qui m’a permis de comprendre lequel correspondrait le mieux à mes exigences professionnelles et familiales. J’ai immédiatement été séduit par Fribourg, qui offre un cadre de vie idéal pour une famille, à proximité du lac et des montagnes. Il s’agit aussi d’un choix intéressant du point de vue budgétaire, car le coût de la vie ici est moins élevé qu’ailleurs en Suisse. Après avoir analysé les besoins de Cofiem, et notamment le fait que je serais seul dans un premier temps pour lancer l’antenne suisse, la promotion économique cantonale (PromFR) m’a aiguillé vers le Marly Innovation Center. Le MIC est un « business center industriel » : il offre la flexibilité et les services d’un business center dans un cadre technique et industriel. Grâce aux services de loge, d’affranchissement, d’impression et de maintenance, j’économise du temps et je peux me concentrer sur mon métier. Les espaces de location, que ce soit les bureaux ou les solutions de stockage, sont flexibles et adaptés à nos besoins actuels et à notre rythme de croissance. En tant que nouveau venu, j’ai donc pu démarrer de manière rapide et peu coûteuse, sans prendre trop de risques. Le MIC est également un lieu de rencontre où les gens peuvent échanger et développer des synergies : j’apprécie beaucoup les possibilités de réseautage avec les 150 entreprises présentes sur place.

Quelles différences avez-vous pu constater entre la Suisse et la France dans le monde des affaires ?

Les attentes des clients sont très différentes d’un pays à l’autre : il est donc indispensable d’adapter son approche commerciale pour pouvoir répondre aux attentes du marché local. En France, tout tourne autour du prix, alors qu’en Suisse, ce sont la qualité et le service qui priment. Contrairement à la France, le client suisse vous appellera rarement pour renégocier un prix, ou pour se plaindre que la solution proposée est plus chère que la concurrence. Si le prix est jugé correct, l’affaire se fera rapidement ; s’il ne l’est pas, le client va passer directement à un autre prestataire. Il faut donc bien se positionner dès le début de la relation commerciale. J’ai également remarqué qu’il y a une dimension humaine plus forte dans le lien qui se crée avec le client. Bien que plus difficile à gagner, le client suisse est généralement fidèle une fois que la confiance s’installe. Une autre différence majeure réside dans la langue : en France, tout le monde parle la même langue, alors qu’en Suisse, ce n’est pas le cas. Pour pouvoir fidéliser nos clients en Suisse alémanique et travailler avec eux dans la durée, nous devrons bientôt recruter un collaborateur qui parle suisse allemand.

Quel a été l’impact de la pandémie sur vos activités ?

PLSWISS a bénéficié de la crise. La pandémie ayant perturbé les chaînes d’approvisionnement mondiales, beaucoup d’entreprises se sont tournées vers nous pour éviter de se retrouver paralysées ou de subir des pertes significatives. Nous leur avons montré que le reconditionné est une alternative fiable et durable au neuf, offrant les mêmes garanties et des délais sensiblement plus courts. Au début, on a pu décrocher certains contrats car les entreprises n’avaient pas d’autre choix, mais on constate que plusieurs d’entre elles ont maintenant changé leur vision de faire des achats et nous sollicitent systématiquement en tant que fournisseur potentiel. J’ai également été positivement surpris de voir que pendant la crise, beaucoup d’entreprises ont diversifié leur carnet de commande afin de soutenir tous leurs fournisseurs, des plus petits aux plus gros. Un acte de solidarité et d’entraide que je n’avais jamais vu auparavant.